La pénurie de semi-conducteurs s’aggrave avec le manque de main-d’œuvre

Une crise sans précèdent frappe le marché mondial des puces électroniques et des semi-conducteurs. De l’automobile à la téléphonie, ce sont une multitude de secteurs qui sont affectés par ce ralentissement global. Plusieurs phénomènes sont à l’origine de cette situation complexe, notamment, une consommation à la hausse de semi-conducteurs entraînant une crise de l’offre, une augmentation des coûts des matériaux et des ruptures de stock dramatiques. Le manque de main d’’œuvre dans les usines de fabrication accentue davantage cette situation qui ne devrait pas s’améliorer avant 2022 voir 2023 pour certains secteurs. La pénurie de semi-conducteurs est bien réelle et va perdurer.

80 % des fabricants de puces disent qu’il est devenu difficile de trouver des travailleurs

Selon une enquête d’IPC, 80 % des fabricants de puces disent qu’il est devenu difficile de trouver des travailleurs qui doivent être spécialement formés pour manipuler les composés hautement toxiques utilisés dans la fabrication des semi-conducteurs. Le problème est plus grave en Amérique du Nord et en Asie, où les entreprises sont plus nombreuses à signaler une hausse du coût de la main-d’œuvre qu’en Europe.

Toutefois, seul un tiers des fabricants de puces asiatiques déclarent avoir plus de mal à trouver des travailleurs qualifiés, contre 67 % des entreprises nord-américaines et 63 % des entreprises européennes. Cela pourrait bien expliquer pourquoi les entreprises asiatiques de semi-conducteurs sont moins nombreuses (42 %) à signaler une augmentation de leur carnet de commandes, contre 65 % des entreprises nord-américaines et 60 % des entreprises européennes.

Pour combler ces lacunes, les acteurs entendent bien trouver des solutions : 46% d’entre eux ont recours à la montée en compétence de la main d’œuvre actuelle, 44% ont décidé d’augmenter les salaires pour rendre les emplois plus attractifs. D’autres ont décidé d’offrir des formations supplémentaires (37%), d’instaurer la flexibilité des horaires (37%), de créer de nouvelles voies d’accès aux talents inexploités, etc.

90% des entreprises mondiales subissent une augmentation des coûts des matériaux

Parmi les problèmes principaux, l’augmentation des coûts des matériaux concentre la plus grande partie des réponses. À l’échelle mondiale, 90% des entreprises mondiales subissent ce phénomène et les marges des fabricants de puces se réduisent en conséquence.

Près de 210 milliards de dollars de perte sont comptabilisés en 2021 pour l’industrie automobile d’après un rapport d’AlixPartners. On note également un déficit de production de 7,7 millions de véhicules dans le monde.

La situation devrait encore empirer en 2022, avec des prévisions de 8,45 millions d’unités dans le monde. Les prévisions sont plus optimistes pour 2023. Le constat est difficile pour les constructeurs automobiles puisque les technologies qu’ils intègrent dans l’habitacle des véhicules nécessitent bien entendu des semi-conducteurs. La priorité étant pour le moment donné aux fabricants de smartphones, et de consoles de jeux.

TSMC ne prévoit pas de sortir de la pénurie de semi-conducteurs avant 2023

Le plus grand producteur de semi-conducteurs Taiwan Semiconductor Manufacturing Co. ne prévoit pas d’amélioration significative avant 2023. L’entreprise fonctionne déjà au maximum de ses capacités avec une demande toujours élevée. La chaîne d’approvisionnement est extrêmement tendue. Nvidia , Apple, Broadcom ou Qualcomm, tous reposent sur TSMC ou d’autres fabriques pour fournir leurs puces électroniques. Ces entreprises subissent donc toutes le goulot d’étranglement de la fabrique TSMC.

Qualcomm a prévenu en février que la société avait du mal à répondre à la demande. Apple aurait également été affecté par une pénurie de composants d’affichage. Quant à Nvidia, mettre la main sur une carte graphique récente relève presque de l’impossible. Entre les commandes massives des mineurs de bitcoin et la pénurie mondiale de semi-conducteurs, faire l’acquisition d’un GPU n’est vraiment pas aisé cette année…

Selon Bloomberg, TSMC s’apprête à dépenser 30 milliards de dollars pour la création de nouvelles fabriques et des mises à niveau cette année. Les autres entreprises comme Intel qui possèdent leurs propres unités de production connaissent malheureusement le même problème de pénurie de semi-conducteurs.

Un plan de 20 à 30 milliards en Europe

La stratégie de l’Initiative Alliance microélectronique consiste à retrouver une production européenne de semi-conducteurs avec un budget alloué de 20 à 30 milliards d’euros. En France, 6 milliards d’euros vont être consacrés aux semi-conducteurs pour retrouver une production et réduire cette dépendance aux marchés étrangers.

La stratégie s’oriente vers un investissement massif pour relocaliser la production en Europe. Une solution qui ne fait pas forcément l’unanimité ou qui prête à se questionner sur les conséquences d’un rapatriement général de la production des semi-conducteurs.

L’un des problèmes fondamentaux reste le temps consacré à la création de nouvelles unités de production en Europe. La capacité de production ne pourra réellement augmenter au bout de quelques années seulement, comme l’a confirmé TSMC et sa stratégie de création de nouvelles fabriques.

La demande en semi-conducteurs ne sera probablement plus la même dans quelques années, lorsque les nouvelles fabriques européennes seront à même de fournir une capacité de production conséquente. L’ajustement entre l’offre et la demande reste très délicat pour les semi-conducteurs face à la pénurie mondiale.

Sources : The Current Sentiment of the Global Electronics Manufacturing Supply Chain / PCWorld / BFMTV